une enquête préliminaire ouverte en Espagne pour « agression sexuelle » présumée

Luis Rubiales devant l’assemblée générale extraordinaire de la Fédération royale espagnole de football, le vendredi 25 août 2023, à Las Rozas, dans la banlieue de Madrid.

Le parquet espagnol a annoncé lundi 28 août qu’il allait ouvrir une enquête préliminaire pour « agression sexuelle » présumée à la suite du baiser forcé de Luis Rubiales, président de la Fédération royale espagnole de football (RFEF), à la joueuse espagnole Jennifer Hermoso, lors du sacre de l’Espagne à la Coupe du monde féminine de football.

Le parquet va enquêter sur « des faits qui pourraient être constitutifs d’un délit d’agression sexuelle », a indiqué le ministère public dans un communiqué, invitant Jennifer Hermoso à se mettre en contact avec le parquet de l’Audience nationale « dans un délai de quinze jours » afin d’être « informée de ses droits en tant que victime » et de « déposer plainte », si elle souhaite. En Espagne, embrasser quelqu’un sans son consentement est considéré comme un délit qui relève de la loi sur les agressions sexuelles.

Aussi, le Tribunal administratif des sports (TAD), saisi par le gouvernement espagnol, s’est réuni à 13 heures lundi pour se prononcer sur la plainte de l’exécutif contre Rubiales. Si elle ouvre une procédure, le Conseil supérieur des sports (CSD), un organisme gouvernemental, pourra alors suspendre le président de la Fédération le temps que l’affaire soit jugée sur le fond.

L’étau se resserre autour de Luis Rubiales, qui a refusé de présenter sa démission lors d’une assemblée générale extraordinaire tenue au siège de la RFEF vendredi 25 août. Six membres de l’encadrement de la Roja féminine ont annoncé avoir présenté leur démission, laissant le sélectionneur Jorge Vilda sans adjoints, contraint de prendre ses distances avec M. Rubiales. « Je regrette que la victoire du football féminin ait été ternie par le comportement inapproprié que notre plus haut dirigeant jusqu’alors, Luis Rubiales, a montré et a lui-même reconnu », a-t-il déclaré dans un communiqué repris par plusieurs médias espagnols.

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Des prises de distance en cascade

Dans un communiqué publié sur les réseaux sociaux, les signataires, dont l’adjointe Vilda Montse Tomé, affirment « avoir pris la décision de présenter leur démission » à la RFEF et expriment « leur condamnation ferme et catégorique du comportement de Luis Rubiales à l’égard de Jennifer Hermoso ».

Avant elles, dans un communiqué à l’agence de presse EFE, Luis de la Fuente, le sélectionneur de l’équipe masculine d’Espagne, avait condamné « sans réserve le comportement déplacé et inapproprié du président de la REF », espérant que « les organes compétents prendront les décisions qui s’imposent dans les plus brefs délais. »

Les joueuses de l’équipe espagnole de football, sacrée championne du monde, ont annoncé, vendredi 25 août, qu’elles refuseraient de rejouer pour la sélection sous la direction actuelle de la fédération. « Après tout ce qui est arrivé lors de la remise des médailles du Mondial féminin, toutes les joueuses signataires du présent texte n’honoreront pas une prochaine convocation si les dirigeants actuels sont maintenus », ont écrit les
23 championnes du monde dans un communiqué diffusé par le syndicat Futpro.

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« Je me suis sentie vulnérable et victime d’une agression »

« Je n’ai à aucun moment consenti à ce baiser [que Luis Rubiales] m’a donné et je n’ai en aucun cas cherché à m’approcher du président. Je ne tolère pas qu’on mette en doute ma parole et encore moins que l’on invente des propos que je n’ai pas dits », a assuré Mme Hermoso dans un communiqué publié sur ses réseaux sociaux. « Je me suis sentie vulnérable et victime d’une agression, d’un acte impulsif et sexiste, déplacé et sans aucun consentement de ma part », a insisté l’internationale espagnole.

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Une déclaration qui va à l’encontre du discours tenu par le président de la RFEF. Dans son discours devant l’assemblée générale extraordinaire, Luis Rubiales n’a pas présenté ses excuses pour le baiser, qu’il estime « spontané », « réciproque » et « consenti », mais pour « le contexte dans lequel il s’est produit ». Le patron du football espagnol a aussi dénoncé « le faux féminisme » qui « ne cherche pas la vérité », en fustigeant une « tentative d’assassinat social ».

S’en prenant à plusieurs ministres et personnalités de gauche espagnols qui ont critiqué son geste et parlé de « violence sexuelle sans consentement », il a affirmé qu’il allait « se défendre » contre « ces gens qui tentent de m’assassiner publiquement ». « Mon Dieu, que vont penser les femmes qui ont vraiment subi des agressions sexuelles ? », a-t-il encore lancé. Lundi 28 août, la mère de Luis Rubiales a entamé une grève de la faim pour dénoncer « le harcèlement » subi par son fils.

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Suspension provisoire décidée par la FIFA

Samedi, la FIFA, qui avait déjà lancé une procédure disciplinaire à l’encontre de Luis Rubiales, a décidé de le suspendre provisoirement. « Nous avons décidé aujourd’hui de suspendre provisoirement M. Luis Rubiales de toute activité liée au football au niveau national et international », a déclaré l’instance dirigeante du football mondial dans un communiqué, ajoutant que la suspension durerait au moins quatre-vingt-dix jours, dans l’attente de l’avancée des procédures ouvertes contre l’Espagnol.

Le baiser forcé du président de la Fédération s’inscrit dans un contexte lourd au sein de la sélection espagnole. Des joueuses dénoncent depuis des mois les méthodes jugées « dictatoriales » du sélectionneur, Jorge Vilda, qui bénéficiait du soutien indéfectible de M. Rubiales. Le président de la fédération a par ailleurs été accusé d’avoir organisé des orgies avec l’argent de la RFEF en septembre 2022.

La Fédération royale espagnole de football (RFEF) avait riposté en qualifiant de « mensonges » les accusations portées contre son président. « La RFEF et le président [Rubiales] vont prouver chaque mensonge publié par qui que ce soit au nom de la joueuse, ou, si c’est le cas, par la joueuse elle-même », a déclaré l’instance dans un communiqué publié dans la nuit de vendredi à samedi.

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« Rubiales ne peut rester à son poste »

L’initiative a été saluée par Irene Montero, ministre de l’égalité, qui écrit sur X (anciennement Twitter) : « Face [à l’impunité de M. Rubiales], le parquet et le CSD agissent pour protéger la joueuse, pour dire non au machisme et pour garantir le droit à la liberté sexuelle. »

Dans une interview à El Pais, le ministre espagnol des sports, Miquel Iceta, déplore « un épisode qui nous a amené l’image d’une Espagne machiste », alors que le pays est souvent présenté comme en pointe en matière de luttes contre les violences faites aux femmes. Il s’en remet au TAD, assurant que si celui-ci « accepte la plainte du gouvernement, nous procéderons immédiatement à la suspension des fonctions de président de la fédération ».

De nombreux sportifs ibériques ont également pris fait et cause pour Jenni Hermoso comme les footballeuses Alexia Putellas et Aitana Bonmati, la légende du basket Pau Gasol ou l’ancien gardien du Real Madrid Iker Casillas. Samedi, plusieurs internationales de football leur ont emboîté le pas sur les réseaux sociaux, dont l’Américaine Megan Rapinoe, star du sport féminin et figure du militantisme. « Ils nient ce que nous avons vu de nos propres yeux et qualifient cela de vérité », a-t-elle écrit sur Instagram.

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Le Monde avec AFP

By James Brown

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