Un quart de siècle après avoir tenté de démanteler Microsoft, l’antitrust américain s’attaque à Google, porte d’entrée d’Internet grâce à son moteur de recherche. Le procès s’ouvre à Washington, mardi 12 septembre. Il pourrait marquer l’apogée de l’offensive contre les Big Tech, lancée sous Donald Trump et poursuivie par Joe Biden.
Google traite environ 90 % des requêtes des moteurs de recherche dans le monde, et le ministère de la justice (DOJ) l’accuse de maintenir son monopole « grâce à des accords de distribution d’exclusion » qui font de Google le moteur de recherche par défaut sur le navigateur Safari d’Apple et le navigateur Firefox de Mozilla. Le même genre d’argument avait été invoqué contre Microsoft, qui a utilisé des contrats d’exclusivité pour promouvoir Internet Explorer et éliminer Netscape.
Un grand procès donc, et, pourtant, personne ne croit vraiment à sa capacité de changer la donne. D’abord, la Bourse, comme en atteste le rebond d’Alphabet, la maison mère de Google, qui a gagné plus de 50 % depuis le début de l’année. Ensuite, il y a cette décision du juge présidant au procès, Amit Mehta, qui a retoqué les poursuites intentées conjointement par trente-huit Etats fédérés, républicains et démocrates, sur les pratiques publicitaires de Google et concentré le dossier sur le seul moteur de recherche. Enfin, il y a la série d’échecs essuyés par le gouvernement fédéral, incapable de convaincre les juges de sanctionner les Big Tech.
« Zéro contre quatre »
Cette dernière politique est incarnée par Lina Khan, présidente de la Federal Trade Commission, qui se partage avec le DOJ le soin de mettre en œuvre la politique antitrust de Joe Biden. Cette jeune femme de 34 ans s’était fait connaître en 2017 par un article expliquant que ce n’est pas parce qu’Amazon maintenait des prix bas pour le consommateur qu’il n’abusait pas de sa position au détriment des autres vendeurs référencés sur sa plate-forme. Une fois nommée, elle a multiplié les attaques antitrust, accentuant le retour de manivelle anti-tech commencé sous Donald Trump. Une croisade qui s’est soldée par des échecs emblématiques. « Votre score est de zéro contre quatre dans vos procès antifusions. Pourquoi perdez-vous autant ? », a ironisé le représentant républicain de Californie Kevin Kiley, dans une audition au Congrès, en juillet.
Effectivement, Mme Khan a perdu contre Microsoft, qu’elle voulait empêcher d’acquérir le spécialiste des jeux en ligne Activision, pour 70 milliards de dollars. Le juge a estimé qu’elle n’avait pas prouvé que le rachat allait réduire la concurrence et pénaliser le consommateur. Enseignement à retirer, les juges n’aiment pas sanctionner les intégrations verticales. Déjà, sous Donald Trump, l’antitrust n’avait pas réussi à bloquer le rachat de Time Warner par l’opérateur téléphonique AT&T. Ce qui n’a pas empêché l’opération de tourner au désastre.
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